Interview avec un camarade de l’UPC-Manidem/Cameroun

L’UPML a pu interviewer un camarade de l’UPC-Manidem concernant la situation de la jeunesse au Cameroun et leurs activités militantes.

Nous devons gagner la jeunesse !

L’UPML a pu interviewer un camarade de l’UPC-Manidem [1] concernant la situation de le jeunesse au Cameroun et leurs activités militantes. Les deux organisations sont membres et coopèrent dans la Coordination internationale des organisations révolutionnaires (ICOR). La conférence continentale de l’ICOR Afrique a décidé d’organiser une conférence de la jeunesse africaine en 2023 à Nairobi au Kenya.

UPML : Quelle est la situation de la jeunesse au Cameroun ?

Samuel [2] : Le Cameroun a 25 millions d’habitants et les trois quarts de cette population sont jeunes c’est-à-dire l’âge varie entre 15 et 40 ans. Comme dans beaucoup de pays, la jeunesse supporte des problèmes les plus dures de la société. Elle est au premier rang pour affronter les problèmes de précarité, de chômage, d’exploitation et surtout de chair à canon dans les différentes guerres que nous impose la dictature de Yaoundé (la capitale du Cameroun) car elle est en avant des belligérants.

Comme beaucoup de pays, le Cameroun subi ce que l’on appelle la « mondialisation ». Notre pays doit faire face à deux adversaires. L’impérialisme Français, sa volonté de dominer les Africains d’une manière générale et les camerounais en particulier, n’existe pas du fait d’une sorte de déséquilibre mental dont seraient frappés les représentants de l’État français et des élus français. La volonté de dominer naît du seul fait des intérêts français à préserver en Afrique et au Cameroun. Or ces intérêts sont AVANT TOUT ET EN GRANDE PARTIE ceux des grands groupes qui opèrent dans les secteurs miniers, financiers, industriels. Ces groupes exigent de l’État français, pourtant « garant des grands principes de la République » (Egalite, Liberté, Fraternité, Droits de l’Homme, etc.), qu’il veille à leur règne en Afrique, afin que leurs affaires prospèrent indéfiniment.

Deuxièmement les serviteurs des néo-colons qui ont remplacé les anciens colonisateurs. Ce sont des individus qui ne sont venus à la politique que pour le pouvoir et la fortune – comme cela se trouve aussi ailleurs dans le monde –, et qui par leur faible implantation populaire font d’emblée le choix de se mettre sous la protection de certains États impérialistes plus précisément l’État français. En vertu de quoi de tels dirigeants africains s’engagent à servir les intérêts prétendument de ces États-là qui ne sont pourtant que ceux des groupes monopolistes ; même si ces intérêts sont contraires à ceux de leurs propres populations. Plusieurs puissances y sont impliquées, dont toujours la France avec ses partenaires. C’est le grand capital qui agit à travers les néo-colons et qui travaille pour pouvoir perpétuer sa domination.

La jeunesse se bat et résiste. Une partie de la jeunesse malgré toutes les difficultés pense que les choses vont bouger un jour. Elle y travaille au niveau local et dans différents secteurs. Ce n’est pas la majorité, mais elle donne de l’espoir.

UPML : On voit en Europe des jeunes immigrés arriver aussi du Cameroun

Samuel : Les problèmes d’existence font qu’au Cameroun, il y a divers mouvements de migration : l’exode rural, la campagne se vide et les personnes âgées seules restent dans les villages. Il y a aussi la migration dans les pays voisins et enfin il y a l’émigration vers l’Europe à travers la mer dangereuse et en prenant beaucoup de risques parce qu’ils pensent y trouver l’Eldorado. Tout cela à cause de l’absence d’alternatives : car, pour beaucoup ils ne peuvent faire de bonnes études à cause de la vie dure, pas faire du sport à cause des infrastructures ni s’évader dans les loisirs. La boucle est bouclée.

UPML : Mais actuellement s’ouvre le Coupe d’Afrique des Nations (CAN), compétition de foot-ball au Cameroun ?

Samuel : Pour la CAN, 4 stades flambant neufs ont été construits dans le pays et d’autres rénovés – pour le prestige du pouvoir, pas pour la masse des jeunes qui manque du minimum pour se soigner et s’alimenter. Le stade d’Olembe Baptisé Paul-Biya proche de Yaoundé a coûté entre 300 et 350 millions d’euros, c’est le stade le plus cher d’Afrique ! Pour comparaison, les coûts du stade de France proche de Paris ont été de 260 millions d’euros. Un nouveau scandale politique s’ouvre dans un pays, où deux tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté.

UPML : que pense la population, surtout la jeunesse de la crise dans votre pays. Quelles idées existent sur un changement à venir ?

Image : Une foule de Camerounais·es faisant face à la caméra lève leurs mains et scande.

Samuel : Au Cameroun, la situation n’est pas très différente que dans d’autres pays africains. Beaucoup sont occupés par la survie au quotidien ce qui les éloigne de réfléchir sur le futur. Une frange de la jeunesse espère dans la religion, c’est un grand problème. Les églises et mosquées sont majoritairement fréquentés par les jeunes et les femmes. Les églises vendent de l’espoir et leur message est que plus tu crois en Jésus ou Mohamed, mieux tu iras demain. Il y a plein de charlatans-pasteurs qui les trompent et en abusent en vendant des rêves dans des miracles. Il y a même des nouvelles formes d’églises qui apparaissent et prospèrent, comme l’Église du réveil.

UPML : Et des positions plus politiques, une opposition contre Biya ?

Samuel : Le gouvernement Biya est un sujet, mais il reste souvent tabou à cause de la répression sur la population. Par exemple plusieurs jeunes camarades ont été arrêtés après une réunion et ont passé plus de quatorze mois en prison et jugés au tribunal militaire où ils ont été accusés d’attroupement révolution et tentative de rébellion. Avec cet acte de la dictature, plusieurs jeunes voient la politique comme un potentiel danger pour leur vie. Ainsi, militer dans un autre parti politique que celui au pouvoir parait être étiqueté et tu ne risques jamais trouver un emploi.

UPML : Comment travaillez-vous dans des conditions difficiles ? Vous organisez les vendredis noirs pour la libération des camarades en prison ou l’appel des mères contre la guerre dans le Nord-Est/Sud-Est.

Samuel : Notre mot d’ordre est « Un autre Cameroun est possible, d’autres choix sont nécessaires. » Pour pouvoir faire d’autres choix, il nous faut aider les masses à s’organiser et les éduquer. Même si les conditions sont difficiles, cet engagement, il nous faut le tenir parce que seulement par cette voie le peuple camerounais peut être libéré. Nous allons le plus possible vers les masses, faire un travail de persuasion dans un contact étroit. Certains jeunes vont aussi dans les villages plus grands, y vivent pendant un un certain temps avec la population et surtout les jeunes pour apprendre à les connaître et pour leur présenter le programme de l’UPC. Une fois la confiance installée, c’est plus facile de convaincre.

Nous travaillons avec les jeunes filles et femmes sur les violences de genre, par exemple dans le nord du Cameroun où ces violences sont fréquentes liées à la culture et aux conflits avec les groupes fascistes-terroristes comme Boko Haram.

UPML : Merci beaucoup pour cet interview, camarade, qui montre toute l’importance de la conférence ICOR pour la jeunesse. On vous souhaite beaucoup de succès pour ce projet !

Note

original

Notes

[1Union des Populations du Cameroun – Manifeste national pour Instauration de la Démocratie* ; membre de l’ICOR.

[2nom changé

Mots-clefs : Cameroun

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