Le campement de migrants d’Austerlitz en sursis

Des nouvelles des camps d’Austerlitz au 29 juillet 2015. Ces camps plus discrets car moins médiatisés seront bientôt évacués. Est-ce qu’on va laisser faire la préfecture, la mairie et la police ?

Pour le moment, au milieu des tentes, face à l’ennui, chacun se demande s’il fera partie des heureux bénéficiaires de logements fournis par l’État, et surtout pour combien de temps et à quelles conditions. « La seule promesse qui a été faite lors d’une réunion à la mairie, c’est un logement pour tout le monde », se souvient Nabil, tunisien, interprète bénévole, figure du campement depuis de longs mois déjà.

Plus précisément – afin d’éviter de nouvelles interventions musclées de la police comme à La Chapelle au mois de juin –, les pouvoirs publics appliquent leur nouvelle politique : attendre d’avoir réuni suffisamment de places disponibles dans des centres d’hébergement et des foyers pour vider le camp d’un seul coup, à l’aide de plusieurs bus affrétés spécialement. Ces opérations sont généralement menées avec le concours de la ville de Paris, de la préfecture de région et de l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra).

Même si personne ne connaît encore la date de cette évacuation, elle se rapproche. Plusieurs institutions comme la mairie en confirment l’imminence, sans vouloir s’avancer davantage. L’opération aurait dû avoir lieu autour du 27 juillet, et pourrait se tenir, selon plusieurs sources, dans la première semaine d’août. Ce sera la première fois à Austerlitz. Contrairement à ce qui se produit dans d’autres campements de la capitale, les migrants ne sont pas en permanence sous les yeux des riverains et des pouvoirs publics. Quasiment invisibles depuis la voie rapide qui longe les quais, ils ne sont entourés d’aucun immeuble d’habitation. Ils ne dérangent personne et c’est bien pour cette raison que la mairie a laissé prospérer le rassemblement. Ces quais du XIIIe arrondissement sont, depuis des décennies, le lieu d’élection de personnes sans abri.

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Cette organisation fait dire à plusieurs qu’ici,« par rapport à d’autres camps, comme Pajol [dans le XVIIIe arrondissement], c’est un paradis ». Le point d’eau à proximité et les toilettes publiques installées par la mairie peuvent effectivement faire figure de conditions luxueuses à côté du dénuement total d’autres points de chute de réfugiés dans la capitale. Mais rien ne peut faire oublier aux occupants du camp la perspective d’un logement en dur et d’une situation administrative plus simple. Tous gardent aussi en mémoire les échauffourées d’il y a quelques mois avec des « fascistes » venus en découdre à grands coups de slogans racistes.

Malgré l’espoir que les habitants du campement affichent, plusieurs questions restent en suspens à propos de l’évacuation prochaine. Tous les migrants ne sont pas de potentiels demandeurs d’asile, même si « c’est le cas d’une majorité d’entre eux », comme le souligne une responsable du Secours catholique. Les Tunisiens, par exemple, ne devraient pas être hébergés plus d’un mois. Et même pour les autres, ils pourraient tomber sous le coup du règlement Dublin, règle européenne qui veut que le premier État membre de l’Union européenne où un migrant a été identifié est responsable de l’examen de sa demande d’asile.

Plusieurs sources associatives indiquent que les pouvoirs publics seront enclins à la clémence sur ce point – comme ils en ont la latitude réglementaire. Aucune garantie n’a toutefois été apportée. Le risque est grand de voir le campement se reformer quelques jours voire quelques heures seulement après le départ des bus pour les centres d’hébergement. C’est ce qui s’était produit, il y a seulement quelques semaines, à Pajol et à La Chapelle.

Lu sur mediapart

Pour en savoir plus sur les agressions des identitaires sur les camps à Austerlitz :

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